Yosemite - Chico

3000 miles de road trip dans l’Ouest américain en trois semaines.
Troisième étape : La Sierra Nevada.

Pour accéder au Graal, une place dans un camping au centre du parc à un prix modique, il faut se lever de bonne heure. En fait, passé 8h30, tous les emplacements sont réservés. Le Camp 4 est l’un des plus vieux de Yosemite, et le QG des grimpeurs. Le dos de la cabane des rangers est couvert de petites annonces en recherche de matériel ou de compagnons d’aventure.

Notre tente installée, on file de l’autre côté de la vallée, vers le Glacier Point. La route en elle-même est fantastique, composée de points de vue à chaque virage. Elle vient juste de rouvrir, après des mois d’hibernation et sur le côté une biche y pâture les jeunes pousses printanières à la lisière du bois : on se sent privilégié. Mais pas pour longtemps :  il n’est pas si tard et on peine déjà à se garer.

On entame le circuit Taft Point – Sentinel Dome. Le chemin pour atteindre chaque point n’est pas si complexe mais la boucle entière nous occupe une bonne partie de la journée. En route on croise d’autres cervidés et une marmotte, surprise derrière un rocher. Depuis le Taft Point on peut observer quelques cascades et tout le côté Ouest de la Vallée avec une vue superbe sur El Capitan. La roche est abrupte et la zone est dentelée de falaises au bord desquelles les plus audacieux prennent des photos, les pieds dans le vide.

On reprend la route vers le Sentinel Dome, le temps est couvert mais pas spécialement inquiétant. Le chemin se sépare en deux : une flèche indique « Glacier Point 1,6 km », l’autre la suite du sentier vers le dôme. Selon les randonneurs que l’on croise, l’aller-retour devrait nous prendre 45 minutes à tout casser. On se dit que ce serait dommage de louper ça. La descente dans la pinède bien qu’un peu à pic se fait effectivement en un rien de temps.

À l’arrivée, la vue est spectaculaire, notamment sur le Half Dome, la table d’orientation permet de mieux comprendre le paysage, par contre la nuée de touristes qui nous entoure rend le moment un peu moins excitant. Jusqu’à ce qu’une énorme averse déverse des seaux d’eau sur le public et que tout le monde reparte vers sa voiture. Après quelques minutes d’hésitation – et de désespoir face à la côte qui nous attend, on reprend le chemin qui nous a menés là.

Lorsque nous retrouvons le panneau laissé quelque temps auparavant, la pluie s’est arrêtée, et l’odeur des pins mouillés rafraîchit l’air. Comme la pente ne cesse jamais de monter, on réalise qu’on a peut-être pris la boucle dans le mauvais sens. Mais ça en vaut la peine : le dôme de granit est superbe et offre une vue à 360° sur tout le parc. Le climat mitigé accentue les contrastes dans les pins. La fin du parcours n’est pas très difficile et sur la route retour vers le campement, on s’arrête au Tunnel View Point pour attraper quelques minutes d’arc-en-ciel sur la vallée. Cette journée se termine avec une bière et une pizza, parce qu’on en a déjà marre de nos sandwichs au concombre.

Le lendemain, c’est lundi. On a choisi de se faire une autre grosse balade avant de reprendre la route et de se lever à 6h. Certains dorment encore même si l’on est loin d’être les premiers levés. Histoire de gagner du temps, on petit-déjeune sur le parking et on file vers le Happy Isles Trailhead. Le circuit commence avec Vernal Falls. Si elle n’est pas très difficile d’accès , il faut quand même grimper quelques 136 marches de granit et parfois raser les murs sur des passerelles étroites. Impossible d’arriver là-haut sec mais par une belle journée comme celle-ci, on est cerné d’arcs-en-ciel toute l’ascension. On continue de monter jusqu’à Nevada Falls. C’est toujours raide et on gagne en visibilité sur la vallée, néanmoins la cascade en tant que telle n’est pas aussi impressionnante. On fait une petite pause au sommet et un écureuil veut nous tenir compagnie (et partager notre barre de céréale). Il est presque impossible à chasser, trop habitué qu’il est d’être nourri par les humains.

On rattrape ensuite le célèbre John Muir Trail. Ce sentier long de plus de 300 km suit la chaine montagneuse de la Sierra Nevada. Il part de Yosemite et court jusqu’au Sequoia National Park et a été nommé après John Muir, un naturaliste du XIXème siècle qui a milité pour la préservation des parcs nationaux, Yosemite en tête. Cette fois, on a pris la boucle dans le bon sens et on parcourt facilement les kilomètres restants.

“Yosemite Park is a place of rest, a refuge from the roar and dust and weary, nervous, wasting work of the lowlands, in which one gains the advantages of both solitude and society. Nowhere will you find more company of a soothing peace-be-still kind.”

John Muir

On taille la route jusqu’au Lac Tahoe. Il est prévu de dormir à Carson City, à l’Est du lac. Pour y accéder, il faut passer par le côté escarpé de la U.S. 50. Sauf qu’en mai il y a toujours de la neige à certains endroits et on n’échappe pas à un court (mais impressionnant) épisode de pluie givrante et bitume gelé. L’air est vraiment frais par ici. Ce soir, on dort chez Darla, une productrice vidéo excentrique d’une soixantaine d’années et férue de jeux de société. Après s’être délecté de notre première douche depuis des jours, on passe une bonne partie de la nuit à jouer aux Aventuriers du Rail et à Vercle, avec Darla et son compagnon, fraîchement rentré de la pêche à la ligne, à 22h.

Forcément le lendemain, on met un peu de temps à décoller. On réalise aussi qu’avec notre maigre matériel de camping, ça va être compliqué de remonter vers les parcs à l’intérieur des terres plus au nord, parce que la neige y est encore bien présente. On décide de piquer vers la côte, en direction du Red Wood Park sans aucun plan logement pour la nuit à venir, comme d’habitude. Sur les conseils de Darla, nous passons voir Emeral Bay, l’un des spots les plus mignons du Lac Tahoe. Un chemin facile descend vers la baie au milieu de laquelle trône une petite île solitaire dotée d’une tour en pierre. Un ponton de bois permet de s’avancer au milieu de l’eau turquoise.

Les options de camping sauvage sont assez maigres sur cette route. Par chance, les étoiles s’alignent et notre futur nouvel ami Will accepte de nous héberger sur son canapé dans la petite ville étudiante de Chico. Cette fois, ce sont les parties de Super Smash Bros qui occupent quelques heures de notre soirée, d’autant que Will est (sur)entraîné.

Bilan carbone : 432 miles

On a dormi : 1 nuit à côté d’un paquet de nachos géant

On a gagné : 1 partie des Aventuriers du Rail

On aurait pu éviter : d’arriver sans savoir où l’on allait dormir

On recommande : d’aller à Yosemite (en évitant le week-end), le Camp 4, encore et toujours de faire du Couchsurfing